Que se passe-t-il sur la ligne SNCF Clermont-Ferrand – Paris ?

Ouverte en 1858, la ligne SNCF reliant Clermont-Ferrand à la capitale est aujourd’hui l’un des principaux points noirs du réseau ferroviaire français. Depuis de nombreuses années, les problèmes rencontrés sur cette ligne ne cessent de s’accumuler, provoquant un ras-le-bol qui devrait être en partie apaisé par les travaux de régénération prévus pour fin 2026.

La maquette du nouveau train Intercités était présentée le jeudi 15 décembre 2022 en gare de Clermont-Ferrand. Photo : Fabien Gandilhon

La maquette du nouveau train Intercités était présentée le jeudi 15 décembre 2022 en gare de Clermont-Ferrand. Photo : Fabien Gandilhon

Le ras-le-bol des usagers de la ligne SNCF Clermont-Paris a sans doute atteint son paroxysme le mardi 19 et le mercredi 20 juillet dernier. Du retard au départ, un incident sur les lignes à cause de la chaleur, une rupture de caténaire, puis une nuit dans le train dans lequel certains voyageurs avaient été rapatriés… Les usagers de l’Intercités ont vécu un enfer. En pleine période de canicule, le train était parti de Paris avant d’arriver à destination le lendemain avec un peu plus de 19 heures de retard. 

Ce retard a provoqué une très grande colère, notamment celle d’Olivier Bianchi. “Une nouvelle fois la ligne Paris-Clermont défraie la chronique”, a tweeté le maire de Clermont-Ferrand. L’édile a même demandé un rendez-vous avec le ministre des Transports Clément Beaune pour régler cette situation catastrophique.

Une ligne en piteux état

Si cette ligne accuse tant de retards, cela s’explique par une accumulation de problèmes. “Nous sommes confrontés à deux problèmes majeurs. Le premier est que très peu de travaux ont été effectués sur la ligne depuis une trentaine d’années”, constate Frédéric Aguilera, maire de Vichy, ville d’arrêt du train. “Ce manque d’entretien, de prise en compte, fait qu’aujourd’hui l’état de la ligne est obsolète.” Le deuxième problème évoqué par le maire de la reine des villes d’eau est l’état des trains. “Dans la continuité des lignes obsolètes, les trains le sont aussi. Il s’agit de vieux trains des années 1970 qui sont aujourd’hui à bout de souffle”, commente l’élu, répondant aux questions de L’Effervescent.

Frédéric Aguilera dresse un bilan très simple pour établir les causes des retards, “50 % des retards sont dus à l’état de la ligne et les 50 % restants sont liés à l’état des trains. Quand on laisse la ligne pourrir, voilà ce que ça donne.”

Un temps de parcours qui s’allonge

L’addition de tous ces facteurs fait qu’aujourd’hui le temps de parcours s’allonge : pour rejoindre Paris depuis Clermont, il fallait 2h58 en 2008 par le direct. Il faut aujourd’hui 3h14, soit un allongement de 16 minutes. Cela ne s’applique pas que pour les trains directs. Les trajets avec des arrêts allongent le temps de trajet à 4h15 en moyenne. De plus, un troisième facteur vient allonger le temps de trajet. Il s’agit de “la difficulté à s’insérer au sein de l’étoile ferroviaire de Paris, surtout aux heures de pointe où les trains croisent les RER”, explique Frédéric Aguilera.

Marie emprunte au moins cinq fois par mois la ligne Clermont-Ferrand – Paris. En tant que voyageuse régulière, elle remarque cet allongement : “Je vois bien que c’est plus long. Si on ajoute à ça les nombreux retards causés par les divers incidents, il y a de quoi être énervé”. Selon elle, de grands changements sont à effectuer. “Depuis le temps que je dis que l’état de la ligne est déplorable, je suis contente de savoir que des travaux vont être entrepris pour la restaurer comme il se doit, ça ne peut lui faire que du bien”, estime-t-elle.

Un incident synonyme de prise de conscience

Les multiples retards et surtout le retard de 19 heures ont été synonymes d’une réaction des principaux concernés, notamment Clément Beaune, le ministre des transports. Cette prise de conscience pousse l’État à investir. Au total, ce n’est pas moins de 800 millions d’euros qui vont être mis sur la table dans le but de remettre en état la totalité de la ligne entre Clermont et Paris. Les travaux ont déjà commencé, mais ils s’annoncent très longs. Selon Frédéric Aguilera, “on va encore galérer jusqu’en 2026”. “Les travaux doivent être faits, mais on ne peut pas fermer la ligne pour les réaliser, ce qui signifie que ceux-ci vont se faire la nuit. Mais je suis optimiste quant à la date de la fin des travaux. Ce sera fait pour 2026”, affirme-t-il. 

Un des Intercités actuellement sur rails pour rejoindre Paris et Clermont-Ferrand. Photo : Radio France - Emmanuel Moreau

Un des Intercités actuellement sur rails pour rejoindre Paris et Clermont-Ferrand. Photo : Radio France – Emmanuel Moreau

 

En outre, “130 millions d’euros de plus vont être alignés pour remplacer les trains actuels par des trains Oxygène avec plus de places, plus de services et plus de confort à bord”, promet Paul Bilaine, responsable relations presse TGV, Intercités, Ouigo chez SNCF Voyageurs. Cet investissement sera financé aux deux tiers par l’État et un tiers par la Région Auvergne-Rhône-Alpes. Ces nouveaux trains sont actuellement en commande et seront livrés fin 2024. Ils devront passer par plusieurs tests et essais sur les lignes avant de pouvoir être exploités d’ici à 2025.

Des travaux de régénération, mais pas de gain de temps

Cependant, Paul Bilaine et Frédéric Aguilera s’accordent sur un point : il s’agit de travaux de régénération visant à remettre la ligne en état de marche correct. Il n’y aura donc pas de gain de temps pour l’instant. Néanmoins, l’élu explique qu’il s’agit “d’un premier pas vers une liaison des deux villes en 2h30.” Pour l’instant aucune étude n’a été faite pour établir le coût des travaux, mais le maire de Vichy assure que pour mener à bien ce projet, il faudra investir autant que pour régénérer la ligne. “Il faudra supprimer des virages et les passages à niveau. Il y a une dizaine de passages à niveau sur la totalité de la ligne et la suppression d’un seul coûte déjà entre 10 et 15 millions donc ça monte vite.”

Pourtant, malgré l’optimisme de Frédéric Aguilera, le gain de temps n’est pas une priorité, selon Grégory, contrôleur à la SNCF. “Notre temps de trajet est très bien, pourquoi le changer ? On a déjà la chance d’avoir des trains réguliers qui rejoignent les deux villes”, commente le cheminot. Selon lui, chercher à gagner du temps de trajet serait catastrophique : “Pour gagner du temps, il faudrait supprimer des arrêts, ce qui n’est pas une bonne option pour les voyageurs. Les voyageurs de Nevers ou Moulins devraient venir à Clermont pour prendre le train, ce serait n’importe quoi. Et puis, le temps de trajet serait le même, voire plus long pour eux si on prend en compte le fait de venir à la gare.” Pas de gain de temps à prévoir pour l’instant, mais les retards devraient se réduire en 2026. Les voyageurs n’attendent que ça.

Timothée Peigney



Catégories :Auvergne, Vichy

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