EN IMAGES. Les petites voix de la manifestation en neuf portraits

A l’occasion de la dixième journée de mobilisation, ce sont près de 2 500 personnes, selon les syndicats, et 1 400 selon la police, qui ont manifesté dans la cité thermale mardi 28 mars. L’Effervescent a parcouru cette foule vichyssoise pour dresser, en photos, neuf portraits de manifestants.

Entre 1 400 et 2 500 personnes ont manifesté dans les rues de Vichy, mardi 28 mars, contre la réforme des retraites. Crédit : Joey Temple

Entre 1 400 et 2 500 personnes ont manifesté dans les rues de Vichy, mardi 28 mars, contre la réforme des retraites. Crédit : Joey Temple

A Vichy, le mardi 28 mars, loin des drapeaux et des gilets colorés des syndicalistes, à des dizaines de mètres de la tête du cortège, les messages lancés depuis le mégaphone sont à peine audibles. Pourtant, lors de cette dixième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, elles sont là, elles poussent, elles marchent et chantent parfois. Les petites mains et les petites voix de la manifestation, noyées dans la cacophonie générale, font battre le cœur du mouvement. 

Daniel, Bertrand et Alain : “C’est loin d’être la première fois qu’on se mobilise ensemble !”

A quelques minutes du départ, place Charles de Gaulle, Daniel, Bertrand et Alain trépignent devant le bâtiment de la Poste. Ils sont liés par la manifestation depuis longtemps. En 2005, ils travaillaient tous pour l’entreprise Sediver à Saint-Yorre, lorsqu’elle a été délocalisée en Chine. Un choc qu’ils avaient “vécu ensemble” et qui les pousse aujourd’hui à protester, encore unis, contre cette réforme qui “est injuste pour les jeunes ! ” 

Eliette : “Je dois être un profil particulier, mais ça me tient à cœur !

Venue seule, Eliette marche, dans le silence, entourée des autres manifestants. Son style dénote légèrement dans le cortège et elle en est consciente. Elle ne se démarque pas par son âge, à 73 ans, l’ancienne infirmière est loin d’être la seule à avoir dépassé les 65 ans dans le cortège. En revanche, et elle le dit elle-même, sa situation financière est peut-être plus singulière. “Je dois faire partie d’un faible pourcentage de tous les gens ici. J’ai une bonne retraite, je suis assez aisée. Mais je suis là, car je veux me battre pour les autres.” 

“C’est une promenade de santé”

En voilà un dont la présence est désormais une banalité. Claude a fait les neuf manifestations à Vichy contre cette réforme des retraites et bien d’autres dans sa vie d’homme engagé. “Je plaide pour une retraite entre 55 et 60 ans. Et aussi pour un salaire minimum de 2 000 euros. On ne peut pas vivre dignement en France sans ça”, revendique-t-il, médecin retraité. Il se targue d’être d’un soixante-huitard aguerri. “C’est une promenade de santé à côté de Mai 68”, sourit-il.

“Je l’ai un peu traînée ici” 

Si les retraités sont majoritaires dans les rues de Vichy, les actifs aussi sont là. Manu, travailleur à la CCAS (caisse centrale d’activités sociales) en fait partie. Il est syndiqué, mais aujourd’hui, rien ne le laisse transparaître. Ses camarades aux couleurs de la CGT avancent devant, lui a décidé de rester derrière, “en civil”. Il a privilégié la balade en amoureux. A son bras, Sandrine. Elle est intérimaire et, elle, n’est pas syndiquée. Manu en rigole : “C’est ma faute, je l’ai un peu traînée ici.” 

“J’y pense, mais ce sont encore des dépenses”

Un peu de couleur sur son dos, mais pas celle d’un syndicat. Du moins pas encore. Mais c’est peut-être pour bientôt. Âgé de 29 ans, Anthony travaille chez GRDF. Quand il est descendu dans la rue pour la première fois, c’était avec les gilets jaunes. “Je protestais pour le prix de l’essence sur les ronds-points, aujourd’hui c’est à deux euros et on ne dit rien parce qu’il y a les retraites, mais je n’oublie pas ce combat-là”. Il réfléchit à se syndiquer ces dernières semaines. Mais le coût de l’adhésion le freine à l’heure où sa paye empathie chaque fois qu’il fait grève.

“J’avais besoin de voir pour savoir”

Sur le trottoir, à deux mètres du cortège qui occupe la route, il garde ses écouteurs et consulte son téléphone fréquemment.  Pour sa toute première manifestation, Lucas, 26 ans, reste en retrait. “Dans les médias, on nous dépeint toujours le même visage des manifs. Il fallait que je me fasse mon propre avis”, explique le jeune vendeur. Pas question de chanter, mais simplement de pouvoir dire à son grand-père qu’il y était, comme lui à son époque, quand il manifestait déjà pour les retraites.

“Je n’avais pas cours, j’en ai profité”

Mère et fils dans un combat commun. Émeline est fonctionnaire de l’Éducation nationale, Raphaël est lycéen. Petit sourire aux lèvres pour la maman au moment de dire son métier, le regard légèrement amusé de faire prospérer le stéréotype de l’enseignant manifestant. A ses côtés, son fils se réjouit de ne pas avoir cours. Il marche d’un pas enthousiaste, heureux de pouvoir soutenir sa mère et de défendre ses idées face à une réforme qu’il juge “injuste”.  

“Je n’ai pas le choix, mais je suis de tout cœur avec eux”

Le regard curieux, Margot est sortie de sa boutique de thé pour voir les manifestants traverser la rue du Président Wilson. Elle vient juste de décrocher un CDI dans ce magasin, alors manifester n’était pas trop dans ses options. La patronne n’est pas là donc elle doit tenir le commerce. La contrainte l’en empêche, mais si elle avait pu, elle serait avec eux en ce moment. 

“Au moins, je peux participer à ma manière”

Posté devant sa vitrine, il guette les foules manifestantes à la faveur de son patron. Le torse bombé, Zinedine porte fièrement son pin’s aux couleurs du Parti Communiste Français (PCF). Serveur intérimaire, il ne pouvait pas prendre le risque de manifester alors, comme chaque après-midi, il assume le service des clients à sa terrasse. Seulement, lorsque les manifestants passent devant sa boutique, il sort, met les mains dans le dos et cesse de travailler. C’est sa manière à lui de participer.

Joey Temple



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