Lors des élections, il est important que l’égalité des chances soit honorée. Pour ce faire, chaque candidat déclaré a le droit au même temps de parole que ses opposants. Mais comment cela est-il régi ? Comment s’assurer que ce principe est bien appliqué ? Un organisme a la responsabilité de cette tâche : le Conseil supérieur de l’audiovisuel.

Les principaux candidats à l’élection présidentielle de 2022. Montage : Louis Canoby
À moins de deux semaines du début de 2022, année marquée par l’élection présidentielle française, la pré-campagne s’intensifie pour les différents candidats à l’Élysée. Dans notre pays, afin de respecter la devise nationale, l’égalité est de mise entre tous les candidats, notamment en ce qui concerne le temps de parole. Considérant que cette égalité était bafouée, lundi 13 décembre, Valérie Pécresse, candidate LR à la présidentielle, a annoncé qu’elle comptait saisir le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). En effet, elle accuse Emmanuel Macron, président de la République mais candidat actuellement non-déclaré, de se servir de son passage de deux heures sur TF1 et LCI diffusé le 15 décembre pour faire campagne.
Alors qu’il dressait officiellement un bilan de son quinquennat, Valérie Pécresse demande au CSA de rétablir « l’égalité des temps de parole et le fair-play démocratique ». « On ne peut pas avoir un président candidat qui se fait ouvrir les chaînes de télévision à la demande et pendant des heures fait sa campagne, alors que ses adversaires doivent se contenter de cinq minutes de duplex pour lui répondre », a-t-elle alors déclaré. Le CSA a alors indiqué avoir bien pris en compte cette intervention du président sortant. Mais concrètement, quels sont les droits de chaque candidat en termes de temps de parole, et comment tout cela est-il comptabilisé ?
Un décompte proportionnel en temps normal
À toute époque de l’année, un seul organisme est à même de comptabiliser le temps de parole de chaque personnalité politique : le CSA. Conformément à la loi du 30 septembre 1986, dite « loi Léotard », qui a engendré sa création, l’institution s’assure du « respect de l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion dans les programmes des services de radio et de télévision ».
Pour ce faire, le conseil se base sur l’ensemble des interventions politiques, en prenant en compte deux aspects : le temps de prise de parole d’un politique ainsi que de ses partisans d’une part, et les sujets (reportages par exemple) parlant de lui d’autre part.
Les données proviennent de toutes les chaînes de télévision et de radio (à l’exception d’Arte et des chaînes parlementaires, régies respectivement par un organisme franco-allemand et par le bureau des assemblées), qui en font part au CSA tous les mois. En revanche, les publications papier et web ne sont pas comptabilisées. Pour l’audiovisuel, un relevé mensuel est ensuite publié.
Hors période électorale, un tiers du temps de parole est attribué à l’exécutif du pays (président, membres du gouvernement et collaborateurs). Les deux tiers restants sont « réservés aux autres acteurs qui concourent à la vie politique, en proportion de leur poids politique », explique Roch-Olivier Maistre, président du CSA, au journal Ouest-France. « Si vous venez d’une famille politique très puissante, vous avez droit, entre guillemets, à des temps de paroles plus importants ». Cette estimation de poids politique est un calcul complexe. Il se base à la fois sur les résultats aux dernières élections en date, le nombre de représentants au Parlement, ainsi que les sondages d’opinion réalisés. En cela, le temps d’intervention de l’opposition parlementaire ne doit pas être inférieur à la moitié des temps de parole cumulés des représentants du pouvoir en place.
En revanche, il existe un cas un peu particulier : celui d’un président de la République, parallèlement candidat. Dans ce cas, le CSA trie ses paroles, et ne décompte que les déclarations qui relèvent du débat national, et non celles qui relèvent de ses fonctions régaliennes.

Principe de pluralisme politique. Source : CSA
Si des manquements de la part de certains diffuseurs venaient à être reconnus, le CSA a le pouvoir de formuler des avertissements et même d’appliquer des sanctions à ces médias, allant de l’amende à l’interdiction de diffusion d’un programme. Par exemple, en mars 2021, la chaîne CNews a été taxée d’une amende de 200 000 euros, suite aux propos du chroniqueur Eric Zemmour concernant les migrants mineurs.
Un décompte d’équité, puis d’égalité en période électorale
Dès qu’une campagne électorale se met en place, les règles changent et deviennent beaucoup plus strictes. Celles-ci vont crescendo au fur et à mesure que la campagne avance, en passant de temps de parole équitable à égal.
Pour ce qui est de l’élection présidentielle de 2022, même si un certain temps de parole a déjà été décompté à Emmanuel Macron après son intervention chez TF1 le 15 décembre, la période de campagne électorale n’a pas encore été officiellement lancée. C’est à partir du 1er janvier 2022 qu’un principe d’équité se mettra en place, « en fonction là aussi de ce que chaque personnalité politique représente », explique le président du CSA. Ainsi, plus le candidat est haut dans les sondages, plus son temps de parole autorisé est élevé. Jusqu’au 7 mars, veille de l’officialisation des candidats, ce système prévaudra donc.
À partir du 8 mars, et ce jusqu’au 27, toutes les chaînes de diffusion devront s’assurer que l’ensemble des candidats ont, de manière équivalente, accès aux quatre tranches horaires définies par le CSA : le matin (6h-9h), la journée (9h-18h), la soirée (18h-24h) et la nuit (minuit-6h).
Enfin, du 28 mars au 8 avril, veille du premier tour, la stricte égalité du temps de parole devra être respectée entre tous les candidats. Il en est de même entre le 10 et le 24 avril, pendant l’entre-deux tours. Il est de plus à noter que la veille et le jour même du premier et second tour, aucun candidat n’est autorisé à s’exprimer.
Louis Canoby
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