Grand perdant des municipales à Vichy, le Rassemblement National enregistre un score particulièrement bas au premier et unique tour des élections. Cette défaite n’est pas une surprise pour le parti, car plusieurs facteurs ont joué en sa défaveur.

Pour Jean-Pierre Sigaud, l’insécurité règne à Vichy. Photo : Emma Fourreau
Les chiffres sont tombés, dimanche 15 mars au soir, un peu après 20 heures. Cette année, le Rassemblement National n’a pas créé la surprise. La liste RN, soutenue par Jean-Pierre Sigaud, est arrivée dernière dans la course à la mairie de Vichy, avec un score de 9,53 %, derrière les listes LR de Frédéric Aguilera (74,11 %) et PRG d’Isabelle Réchard (13,37 %).
Même si le Rassemblement National, anciennement Front National, était déjà arrivé en dernière position lors du premier tour des élections municipales de 2014, plusieurs facteurs ont contribué à son maintien en bas du classement.
Des mesures controversées
Pour la tête de liste du parti, Jean-Pierre Sigaud, le programme de Rassemblement National comporte plusieurs thématiques essentielles. Parmi elles : la sécurité. « Les Vichyssois nous disent ‘nous, on n’ose plus sortir le soir’. Les femmes ne veulent plus sortir. Il faut donc rassurer la population, en montrant sa police, pour éviter que ça dégénère », confiait par exemple Jean-Pierre Sigaud. Concrètement, le Rassemblement National avait prévu de revoir les effectifs de la police municipale à la hausse, pour mettre en place davantage de patrouilles. « Nous, on est démocrate. On demanderait à la police municipale si elle désire être armée », précisait la tête de liste du RN en février dernier.
Cependant, de nombreux Vichyssois ne partagent pas cet avis. « Vous savez, ça m’arrive fréquemment de sortir le soir dans les rues de Vichy, et à aucun moment je me sens menacée. Forcément il y a de la délinquance, comme partout, mais je ne pense pas que la ville ait besoin de mesures supplémentaires en terme de sécurité », témoigne ainsi Sophie, serveuse dans la ville thermale.
Parmi les autres points du programme de Jean-Pierre Sigaud figure le respect du contribuable. « Il est question de réduire la dette et de diminuer les impôts de manière à ce qu’ils n’augmentent plus du fait de l’inflation. Il faut alors bien utiliser les impôts, ce qui n’est pas forcément le cas avec la mairie actuelle ». Encore une fois, certains Vichyssois s’interrogent sur la cohérence du discours tenu par le parti. « Ce sont des magiciens ? Je ne vois pas comment [le Rassemblement National] peut baisser les impôts tout en renforçant les effectifs de la police municipale. Ça n’a pas vraiment de sens selon moi », ajoute Rachel, étudiante à Clermont-Ferrand résidant à Vichy.
Le lourd passé de la ville
Au grand malheur des habitants, pour de nombreux Français, encore aujourd’hui, Vichy représente les « heures sombres » de la France. Au-delà de la ville, certains y voient le symbole de l’occupation allemande et de la collaboration, en témoigne les tweets de président de la République, Emmanuel Macron, datant du mois d’août 2019. Tweets qui avaient, par ailleurs, fait réagir le maire de Vichy, Frédéric Aguilera.
15 août 1944 : des milliers d’hommes, venus principalement d’Afrique, débarquent en Provence. Après les heures sombres de Vichy, la France va enfin retrouver sa liberté et sa dignité.
Nous devons tant à leur courage. Et pourtant, cette part de l’Histoire reste méconnue. pic.twitter.com/g1x95yuooK
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) August 15, 2019
M. @EmmanuelMacron , une fois de plus vous alimentez un amalgame qui salit l’image de la @VilleDeVichy . Les Vichyssois n’en peuvent plus ! Je vous invite à venir découvrir notre ville et comprendre les conséquences de ce raccourci. #Vichy2000ansdHistoire (Merci de RT) pic.twitter.com/YaQ07jlPVV
— AGUILERA Frédéric (@Aguilera_Fred) August 17, 2019
Par conséquent, les Vichyssois sont aujourd’hui exténués d’être constamment assimilés au régime d’extrême-droite conduit à Vichy par le Maréchal Pétain, durant la seconde Guerre Mondiale. Ils sont « Vichyssois et non Vichystes ». Malgré le fait que le parti ne se revendique pas comme tel, le Rassemblement National, héritier du Front National de Jean-Marie Le Pen, appartient à la famille de l’extrême-droite, de part ses origines et son programme. Ainsi, pour les élections municipales de 2020, Jean-Pierre Sigaud a, en partie, misé sa campagne sur la communication, dans le but de redorer son blason.
« La communication, c’est la répétition. Petit à petit, on arrive à faire rentrer dans la tête des gens que Vichy ce n’est pas la collaboration. Vous savez, moi quand j’étais gamin, dans les années 1960, le régime de Vichy c’était les carottes à la Vichy. C’est-à-dire qu’on nous servait à table des carottes à la mode de Vichy. C’était ça le régime de Vichy. Moi je suis né en 1948 et je n’ai pas collaboré », s’exclame la tête de liste du Rassemblement National. Malgré tout, les raccourcis entre Vichy et collaboration ont, très certainement, été des ennemis redoutables pour le parti tout au long de sa campagne.
Les ravages du Covid-19
Au cours de ces élections de 2020, le Rassemblement National a dû faire face à un tout nouvel ennemi : le Coronavirus. Si les effets de la propagation du virus sur le territoire français ne se sont pas fait ressentir sur le début de campagne de Jean-Pierre Sigaud, ils ont néanmoins eu un impact conséquent sur sa fin de campagne et sur les résultats du premier tour à Vichy. Contrairement à son principal rival, Frédéric Aguilera, Jean-Pierre Sigaud a annulé toutes ses réunions publiques dès la première semaine de mars.
Le développement du virus sur le sol français a pu influencer les résultats des élections municipales, y compris à Vichy. En effet, cette année, le taux de participation à Vichy était de 34,96 % contre 56,73 % en 2014. Ainsi, le Rassemblement National a obtenu 9,53 % des voix avec 560 voix soit presque deux fois moins qu’en 2014, où le parti avait récupéré 13,94 % des voix avec 1.361 voix. La pandémie est donc devenue un obstacle supplémentaire pour le parti, qui était déjà au pied du classement aux dernières élections municipales.
Thomas Hory
Catégories :Vichy
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