INFOGRAPHIES. Tout comprendre de la présence des forces armées françaises dans le monde

Tous les Français savent que leur armée est présente aux quatre coins du monde. Mais peu d’entre eux savent où, pourquoi et quels sont les moyens mis en place pour s’assurer du bon déroulement des opérations. Voici donc trois points essentiels pour comprendre la présence des forces armées françaises dans le monde.

  • Le rôle de l’armée française en métropole et à travers le monde


Les forces de souveraineté

8 150 militaires français sont répartis dans les départements et régions d’outre-mer pour assurer des missions de défense et de sécurité. Ces forces de souveraineté permettent le maintien permanent de la présence française dans les océans et mers de la planète. L’enjeu : assurer la protection des 10 070 754 km² de zone économique exclusive (ZEE) que détient la France.

Elle se place d’ailleurs deuxième au classement des plus grandes ZEE mondiales, derrière les États-Unis, et ce grâce à ses territoires d’outre-mer. En effet, la France profite du Droit de la mer, qui la définit souveraine en matière d’exploration et d’exploitation des ressources sur 370,4 km au large des côtes de chacun de ses territoires.

Les forces de souveraineté assurent principalement des missions de lutte contre la pêche illicite ou contre les trafics, des sauvetages en mer et des combats contre les pirates. En Guyane, les forces françaises assurent également la protection du centre spatiale de Kourou, d’où partent l’ensemble des fusées et lanceurs français.

Les forces de présence

2 800 militaires français sont déployés dans cinq pays pour entretenir des partenariats militaires, tout en assurant un soutien logistique aux troupes déployées en opérations extérieures.

Au Sénégal, l’implantation de bases aériennes permet d’assurer un soutien logistique et opérationnel aux troupes engagées dans l’opération Barkhane. D’autres missions y sont également assurées, avec la formation de divisions militaires locales et la défense des intérêts français dans le pays.

En Côte d’Ivoire, la présence française sur le territoire s’inscrit dans la continuité de l’opération Licorne – lancée en 2002 et dissoute en 2015 – qui avait pour objectif le maintien de l’ordre dans le pays alors en crise politico-militaire. Aujourd’hui, les troupes françaises assurent la formation de soldats ivoiriens. Une tâche devenue compliquée depuis les mutineries survenues au sein de l’armée ivoirienne, en mai 2017.

La même année, le colonel Xavier Lafargue, attaché de défense à l’ambassade de France en Côte d’Ivoire, a fait des révélations significatives dans une interview donnée au service communication de l’ambassade de France d’Abidjan. Il estime que la formation assurée par les forces françaises est, pour le moment, peu efficace car « la Côte d’Ivoire a encore besoin de temps pour réconcilier son armée et mettre en place un outil de défense performant. »

Instruction des formateurs ivoiriens par la force Licorne en Côte d'Ivoire. Photo : ministère des Armées

Instruction des formateurs ivoiriens par la force Licorne en Côte d’Ivoire. Photo : ministère des Armées

Au Gabon, l’armée française est implantée dans le pays depuis les accords de défense signés lors de la déclaration d’indépendance de l’ancienne colonie française, le 17 août 1960. Elle y mène des missions de soutien aux opérations militaires intérieures et à l’entraînement des unités.

À Djibouti, l’essentiel des missions sont assurées par l’armée de l’air et concernent la surveillance aérienne du territoire. Il s’agit de la seule base française implantée dans un pays à l’Est de l’Afrique. Djibouti offre une ouverture sur le détroit de Bab-el-Mandeb, qui fait la rupture entre la mer Rouge et l’océan Indien. La base aérienne 188 « Colonel Emile Massart » représente un point d’appui essentiel pour les forces françaises dans le cas d’une « projection éventuelle des forces prépositionnées dans une mission opérationnelle », comme indiqué dans un dossier de presse du ministère des Armées.

Aux Émirats arabes unis, les forces françaises ont profité de leur collaboration avec l’armée émiratie pour installer une base arrière de soutien à l’opération Serval. En effet, les forces aériennes, navales et terrestres présentes sur place permettent d’assurer le ravitaillement en matériel et l’assistance aérienne pour les 1 000 hommes déployés en Syrie et en Irak. 

Encore dans sa volonté de contrôler les mers, la France profite également de ce partenariat pour avoir une certaine visibilité sur le détroit d’Ormuz, qui relie le Golfe d’Oman et Le Golfe Persique, ce dernier réunissant à lui seul 60% des réserves mondiales de pétrole.

L’opération Sentinelle

13 000 militaires sont déployés en métropole dans le cadre de l’opération Sentinelle, lancée le 12 janvier 2015 à la suite des attentats contre Charlie Hebdo. Des forces des trois armées sont alors placées sous l’autorité civile pour soutenir la police municipale dans ses missions de surveillance et de lutte contre le terrorisme. Officiellement, neuf attentats ont été déjoués en 2019, et dix ont eu lieu. Des chiffres plus mitigés que les années précédentes, qui remettent en question l’efficacité de l’opération Sentinelle.

Bien que le ministère des Armées et le ministère de l’Intérieur travaillent en étroite collaboration pour la sécurisation de la France, l’opération Sentinelle n’est pas sans failles. Le 13 novembre 2015, huit militaires de l’armée de Terre proches du Bataclan avaient reçu l’ordre de ne pas intervenir alors que les terroristes continuaient leur carnage, a révélé un rapport d’enquête parlementaire.

Les fonctionnaires de police présents aux côtés des militaires avaient demandé à la préfecture de police de Paris de donner leur accord à une intervention des militaires présents sur place. La réponse a été immédiate : « Les militaires n’engagent pas le feu sur le territoire national, nous ne sommes pas en état de guerre. » Il aura ensuite fallu attendre presque deux ans et le vote de la loi n°2017-258 du 28 février 2017, relative à la sécurité publique, pour définir précisément les règles d’engagement sur le territoire national.

  • L’armée française : un pilier de la défense mondiale

Une armée française caricaturée

« Cheese eating surrender monkeys », littéralement des « singes capitulards bouffeurs de fromage ». Voici la représentation péjorative qu’avaient les États-Unis de l’armée française dans les années 90. L’expression a été inventée par le scénariste Ken Keeler pour la série Les Simpson.

Elle a été principalement utilisée à partir de 2003, après l’opposition de la France à l’intervention militaire américaine pour la guerre d’Irak. Ce refus avait été perçu par certains médias américains comme de « l’ingratitude » après l’aide apportée par les Etats-Unis durant la Seconde Guerre mondiale.

Dans le monde, l'armée française est victime de nombreux clichés infondés. Photo : Shutterstock

Dans le monde, l’armée française est victime de nombreux clichés infondés. Photo : Shutterstock

Lâche et incapable de gagner une guerre seule : voici les clichés mis en avant dans le monde sur l’armée française. Mais depuis quelques années, cette conception négative est en train de changer. À l’image de Chris Hernandez, un soldat américain qui a travaillé avec des soldats français : « J’avais une mauvaise opinion sur eux avant de servir à leurs côtés. Au Kosovo, l’armée française avait la réputation d’être engagée politiquement et d’être inefficace. »

Bien loin d’être aussi puissante que l’armée américaine – leadeuse mondiale avec ses 1 380 895 soldats et ses 696 milliards de dollars annuels -, l’armée française réussit quand même à s’imposer. Comme le titre Gervase Phillips dans un article pour Le Point : « Non, la France n’est pas si nulle ! »

Une importance mondiale

Dans le classement annuel que fait Global Firepower, la France est 7ème sur 138 pays au rang mondial et 1ère au rang européen. Si les États-Unis restent les indétrônables souverains de cette liste, la France n’est pas en reste. Disposant d’un budget militaire similaire à celui de la Russie, la France peut compter sur ses 203 900 soldats et sur la puissance de 400 chars, 299 avions de combat et 118 navires.

Infographie Emma Fourreau.

Infographie Emma Fourreau.

Contrairement à ses alliés, l’armée française a une façon particulière de faire la guerre, reflet du manque de ressources et de sa lucidité quant à ce qu’elle peut accomplir. Elle est la spécialiste des opérations modestes et discrètes mais meurtrières. Et cela fonctionne, comme le prouve le succès de l’opération Sangaris en Centrafrique et au Mali.

Ce sont d’ailleurs ces opérations qui font que la France est aujourd’hui reconnue comme la meilleure armée européenne. « Il faut que les Européens financent l’effort militaire de la France, affirmait Jean-Luc Sauron, professeur à l’Université de Paris-Dauphine, dans un article de Libération. La seule armée européenne, c’est l’armée française. » 

  • Focus sur l’opération extérieure française la plus importante : Barkhane

Dimanche 16 février, « un soldat français engagé au Burkina Faso dans le cadre de l’opération Barkhane – déployée au Sahel pour lutter contre les jihadistes – a été découvert mort au sein de son campement », a indiqué Thierry Burkhard, le chef d’état-major de l’armée de Terre. Le sergent-chef Morgan Henry était engagé auprès de la force française au Burkina Faso depuis novembre 2019. 

Une opération d’envergure

L’opération Barkhane est menée par l’armée française pour lutter contre les groupes armés terroristes au Sahel. Déclenchée par François Hollande, elle a débuté en août 2014, prenant la suite de l’opération Serval. Barkhane s’appuie sur les pays membres du G5 Sahel  : le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Burkina Faso et le Tchad.

Le 2 juillet 2017, à Bamako, à l’occasion d’un sommet, Emmanuel Macron et les chefs d’États du G5 Sahel ont annoncé la mise en place de cette force conjointe. Constituée d’environ 5 000 hommes, elle est destinée à coordonner la lutte contre les terroristes.

La mort de 13 soldats dans un accident entre deux hélicoptères au combat en novembre 2019 a relancé les débats sur l’engagement controversé de la France au Sahel.

Succès ou enlisement ?

L’objectif de cette opération est de permettre aux États d’assurer leur sécurité de façon autonome. C’est un véritable défi logistique. L’appui logistique de Barkhane s’articule autour de trois points d’appui permanents (N’Djamena, Gao, Niamey) dont deux bases aériennes projetées à Niamey et N’Djamena, huit bases avancées temporaires et trois points d’appui maritimes à Dakar, Abidjan et Douala.

En cinq ans, Barkhane a réalisé plus de 100 consultations et 400 soins par jour. Elle a également permis aux 13 000 soldats des pays du G5 Sahel de suivre des formations dans divers domaines.

Des soldats en mission lors de l'opération Barkhane dans la bande sahélo-saharienne. Photo : ministère des Armées

Des soldats en mission lors de l’opération Barkhane dans la bande sahélo-saharienne. Photo : ministère des Armées

Malgré tout, de nombreuses critiques sur l’armée française émanent des populations locales, qui n’hésitent pas à la comparer au « néocolonialisme ». La France semble isolée dans cette mission et la question de l’aide européenne se pose.

Un certain sentiment antifrançais s’est développé ces dernières semaines, à la faveur de fake news extrêmement virales visant l’armée française. Des infox aux accents complotistes, partagées des milliers de fois sur les réseaux sociaux accusent la France de faire le jeu des djihadistes pour justifier le maintien de sa présence militaire.

Une lutte constante

En janvier, Emmanuel Macron a réuni les cinq présidents des pays partenaires de la force Barkhane à Pau. Il était question d’accentuer son action dans la lutte contre les groupes armés terroristes – une manière de renforcer la légitimité contestée des militaires français sur place.

La France vient également d’annoncer son passage de 4 500 à 5 100 hommes d’ici fin février afin d’inverser le rapport de forces sur le terrain. Il s’agit d’un nouveau signe de la volonté française de poursuivre les actions menées dans le cadre de l’opération Barkhane.

Tanguy Gadin, Emma Fourreau et Arthur Frand



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